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Si les oppositions avaient donc globalement le champ libre jusqu’au 14 Juillet pour imposer leurs sujets, il semble que les partis, de l’ensemble du spectre politique aient du mal à se saisir des causes qui les concernent. Travail, écologie, immigration : les thèmes partisans ne manquent pas, mais pourtant les oppositions ne parviennent pas à tirer pleinement profit de cette séquence si compliquée pour l’exécutif.
Les “casserolades”, ces rassemblements spontanés qui visaient à empêcher par le bruit les visites sur le terrain de membres du Gouvernement ou du Président de la République commencent progressivement à s’estomper. Mais les 3 dernières semaines ont été difficiles pour l’exécutif, qui a dû faire face à des images fortes, de citoyens mécontents, et de ministres inaudibles.
Tout laissait donc à penser que la période, si tendue, en tous cas à l’égard du Gouvernement, permettrait aux oppositions de gagner une nouvelle fois du terrain. Pourtant, depuis des semaines, force est de constater que la récupération de ce ressentiment leur échappe. Chaque parti, chaque formation politique d’opposition a bien contesté cette réforme, mais aucun d’entre eux n’est parvenu à récupérer le titre d’opposant à chef à ce projet. En fait, c’est davantage, la rue, le peuple et les syndicats qui s’en sont vus gratifiés. Il faut dire que leur mobilisation est apparue sincère, authentique, et donc pertinente aux yeux des Français.
Bon, certes, les oppositions ne sont pas parvenues à récupérer la contestation. Mais au sortir de cette crise, plusieurs sujets qui émergent dans le débat public auraient pu laisser penser qu’elles auraient tiré profit de la période. Les partis d’opposition semblent opérer avec un temps de retard, comme une certaine latence.
La gauche bloquée par le RIP
La gauche d’abord, s’est engluée toute seule. Elle a pendant des semaines tenté de fusionner avec les syndicats dans la contestation de la réforme des retraites, mais face au refus de ces derniers, elle a cherché d’autres moyens de se positionner sur le sujet. Les deux demandes de d’examen du RIP auprès du Conseil Constitutionnel, ont en ce sens, constitué l’essentiel de son action ces dernières semaines.
La NUPES en particulier avait fixé comme horizon la nouvelle décision du Conseil Constitutionnel concernant l’avenir de ce RIP potentiel. Si le pari était risqué mais en valait la chandelle, la décision du Conseil des sages a finalement joué en sa défaveur puisque cette nouvelle demande a elle aussi été refusée.
Pierre DHAREVILLE, député communiste, prenait la parole à ce sujet.
La gauche s’est donc bloquée : car investie elle-même de tout son poids sur ce sujet, sans qu’elle obtienne finalement gain de cause. En parallèle, d’autres sujets qui la concernent, comme les négociations relatives aux conditions de travail qui vont s’ouvrir à Matignon, ont été totalement négligées. La NUPES aurait pu faire effet boeuf en portant des revendications, et donc, en accentuant la pression sur le Gouvernement.
Les formations de gauche sont passées à côté de ce sujet.
Les écolos à côté de la plaque
Mais les partis traditionnels de gauche ne sont pas les seuls à être passés totalement à côté de sujets qui devaient pourtant jouer en leur faveur. Voilà plusieurs semaines désormais que quelques départements du Sud de la France souffrent d’une sécheresse extrême. Dans les Pyrénées-Orientales, certaines communes n’ont plus d’accès à l’eau courante tant les nappes phréatiques s’ont épuisées. L’enjeu est de taille : pour les habitants, pour les agriculteurs, pour la biodiversité.
Pourtant, aucune mobilisation écologiste : les verts ne se sont pas saisis de cette question. L’occasion était pourtant rêvée : montrer l’inaction climatique du Gouvernement dans son aspect le plus concret : des rivières à sec, et des régions sans pluie depuis plus d’un an.
Sur ce sujet, les écologistes ont disparu. Sainte-Soaline et sa méga-bassine avait pourtant attiré l’attention de membres des verts, mais ces sujets, qui semblent plus pratiques que médiatiques ont semblé désintéresser les élus d’Europe Ecologie les Verts. Il y avait là une opportunité politique immense : celle de raccorder le parti aux questions environnementales qui ont défini son identité, et de faire preuve de proposition pour mettre fin aux accusations répétées en dogmatismes.
L’eau, l’écologie, non, trop peu pour eux.
Même la droite a disparu
Mais à droite, le paysage politique n’est pas plus radieux. Du côté des Républicains aussi c’est silence radio. Il faut dire que la réforme des retraites, et les votes désordonnés des députés LR sur les articles et les motions de censure, ont semé le trouble au sein du parti de droite.
Nouveau parti, nouveau sujet et pourtant : personne là encore ne s’en ai saisi. Le Gouvernement hésite à déposer devant le Parlement son projet de loi immigration, très controversé avant l’été ou à l’automne, période qui a la préférence de la Première Ministre. C’était là une occasion rêvée pour la droite de mettre la pression sur le Gouvernement et de revenir sur des sujets qu’elle maitrise et qui intéressent son électorat : l’immigration, l’intégration, la souveraineté, les frontières.
La droite elle non plus, ne s’est pas mobilisée sur ces sujets, bien qu’ils lui soient visiblement acquis!
Pendant ce temps l’extrême-droite patiente
Rassurons-nous, le Rassemblement National ne fait pas mieux non plus. Durant tous les débats sur la réforme des retraites, le parti s’était d’ailleurs fait discret. Très peu d’interventions, si ce n’était pour critiquer le recours au 49-3, très peu de vagues, les membres du RN voulaient se faire discrets, et surtout ne pas se positionner sur les retraites.
En attendant, pas de premier mai à Paris, mais une “fête de la Nation”, célébrée au Havre loin de la traditionnelle statue de Jeanne d’Arc. Alors, évidemment le choix de la ville n’est pas anodin. Si Marine LE PEN et le Rassemblement National assurent ne pas être venus pour y provoquer Edouard PHILIPPE, l’ombre du futur concurrent de la candidate d’extrême droite en 2027, maire de la ville pesait tout de même sur l’évènement. Jordan BARDELLA s’est même fendu d’une pique, assurant que les municipales de 2026 permettrait l’élection d’un maire RN au Havre.
Interrogé sur la présence de ce congrès, et les propos du Président du RN, Edouard PHILIPPE a réagi avec semble t il, beaucoup de détachement.
Mais qu’était vraiment venu faire le RN au Havre. Officiellement : y célébrer la paix sociale, continuer à chercher d’incarner le parti des travailleurs, mais surtout rassembler ses cadres, et au passage livrer quelques piques à un maire très bien installé. Là encore, la stratégie est confuse. Pas de ligne directrice, ni non plus de déclenchement d’un compte à rebours. A un an des élections européennes, pour lesquelles il est très bien placé, le parti aurait pu lancer sa campagne ou au moins donner le ton des festivités.
Une vie politique à contre-temps, pourquoi ?
Mais alors comment ce moment de la politique française est-il autant à contre temps des faits qui la font ? Aucun des partis, aucune personnalité n’arrive à incarner les thèmes qui pèsent dans l’opinion. Le pouvoir d’achat, la sécheresse, l’immigration, le dialogue démocratique, aucun sujet ne trouve d’écho pertinent parmi la classe politique.
Il y a là pour sûr, un effet des vacances parlementaires. Mais elles se sont achevées la semaine dernière sans grande différence.
Faudrait-il y voir aussi peut-être l’un des premiers effets des 100 jours d’Emmanuel MACRON, qui aurait définitivement gagné 100 jours de tranquillité avant qu’un premier bilan lui soit imposé au 14 juillet ? La stratégie présidentielle semble efficace : 100 jours d’actions pour lui, 100 jours d’attente pour les autres.
Alors qu’il y a quelques semaines, les français se mobilisaient par milliers dans la rue pour crier à la crise démocratique, que les médias étaient en boucle sur cette même expression, voir, que les partis politiques n’ont pas sauté sur l’occasion pour se saisir des sujets qui préoccupent vraiment les français est particulièrement impressionnant. Jusqu’à quand la politique sera-t-elle à contre temps ?